A l’initiative de Serge Avedikian, acteur et réalisateur franco-arménien, sensible depuis toujours au développement culturel de l’Arménie, des ateliers bilingues de théâtre pour des jeunes comédiens seront mis en place à partir de l’automne 2021.
Dans cet entretien, Serge Avedikian explique tous les enjeux de ce projet ambitieux.
Par Lusine Abgarian
Vous êtes à l’origine du projet « Atelier d’art dramatique bilingue français-arménien ». Quelle est l’historique de cette initiative, comment l’idée vous est venue de mettre en place ces ateliers, et en quoi consiste ce projet en général ?
L’Atelier d’art dramatique bilingue, français-arménien, est une idée qui est née à partir des travaux que j’ai pu faire en Arménie. Tout d’abord il y a une quinzaine d’années, en mettant en scène « Les caprices de Marianne » d’Alfred de Musset, au Théâtre Hamazgayin, avec les comédiens du théâtre, plus tard avec les jeunes chanteurs d’opéra, pour l’opéra « Anouche », au Théâtre Soudoukian qui a pu être aussi représenté en France, sous-titré en français, au Théâtre des Amandiers, à Nanterre. Il y a eu aussi le tournage du film, « Celui qu’on attendait » qui a eu lieu à Khatchik, en 2015 et le travail que j’ai pu faire avec les comédiens arméniens d’Arménie, qui venait d’horizons différents. Puis les tournages, en tant qu’acteur, dans des films et téléfilms en Arménie, en contact avec des comédiens et des réalisateurs m’ont aussi beaucoup appris. Toutes ces expériences de directions d’acteurs m’ont convaincu qu’en Arménie, il y a beaucoup d’acteurs de talent et qui méritent d’avoir des horizons encore plus développés et d’élargir leurs connaissances en contacts d’expériences venues d’ailleurs. Ce qui ne veut pas dire que l’école des comédiens issue de l’Institut du théâtre n’est pas bonne, cela veut simplement dire que d’autres expériences venus d’autres cultures et pratiquées dans d’autres langues peuvent élargir considérablement l’approche d’un comédien vis-à-vis de son travail.
Le but de ses ateliers en Arménie est, en effet, d’inviter des metteurs en scène et des comédiens professionnels, des cinéastes aussi, qui vivent et qui pratiquent en France, de venir faire de vrais ateliers et non pas des conférences ou des Master classe, pendant deux semaines avec 25 candidats, ce qui aurait une approche de la langue française aussi. Les cours des ateliers seront dispensés en français mais traduits simultanément en arménien pour ceux qui ne comprennent pas bien la langue française. Certains nombres de travaux auront lieu en français directement. C’est pour cela que je souhaite que les candidats puissent avoir une approche de la langue française et donc le projet s’inscrit aussi dans une dynamique de la francophonie puisque l’Arménie est un pays membre de la Francophonie.
Qui figurent parmi les professionnels invités ?
Pour les premiers professionnels invités, j’ai pensé à des personnes que je connais très bien et parmi lesquelles beaucoup ont déjà fait le voyage en Arménie et qui connaissent le contexte, un peu la langue et la culture arméniens. Il s’agit d’Ariane Ascaride et Robert Guédiguian, de Simon Abkarian, de Catherine Schaub-Abkarian, que je n’ai pas besoin de présenter, mais aussi des artistes qui n’ont pas encore été en Arménie comme Stéphane Braunschweig, qui est le directeur du théâtre de l’Odéon à Paris, Chloé Réjon qui est sa compagne et qui est comédienne, Pierre Pradinas qui est un metteur en scène que je connais de longue date et qui a dirigé le Centre Dramatique Nationale de Limoges, ainsi que Pascal Légitimus, humoriste, acteur, scénariste, réalisateur et producteur du cinéma français, qui découvriront l’Arménie et apporteront leurs expériences. Dans un deuxième temps je ferai appel à des professionnels qui connaissent peut-être moins la culture arménienne mais qui sont vraiment désireux de partager leur expérience dans un pays comme l’Arménie, dans le cadre que l’on propose qui est lié à la francophonie et qui facilite quand même cette relation. Pour cette première cession ou cursus, on peut l’appeler comme on veut, j’ouvrirais le bal afin de mettre en place le système et de poser les jalons.
Les cibles du projet sont les étudiants en art dramatique ainsi que les jeunes comédiens ?
Oui la cible, comme vous dites, sont des personnes qui pourraient participer aux ateliers, qui dureront donc six mois, à raison de deux semaines par mois pour le premier cursus, ce seraient plutôt les étudiants en fin d’année de l’Institut du théâtre de Erevan, qui auraient une approche de la francophonie, ce seraient aussi des jeunes comédiens, qui sont déjà professionnels, mais qui ont envie de se perfectionner et d’avoir une approche plus approfondie de la langue française, mais aussi des étudiants de l’université française (UFAR) ou de Brussov qui ont envie de se perfectionner en français, à travers le théâtre, ainsi que des jeunes comédiens venus d’Artsakh, de Gumri et d’autres villes et régions. Ce mélange de professionnels et d’amateurs qui pratiquent le théâtre en français peut être très bénéfique à la dynamique du groupe.
Comment et quand va se dérouler l’appel à candidature ? Qui sont les membres du comité de sélection ?
Concernant l’appel à la candidature avec l’organisation de FrAmArt et en accord avec l’Ambassade de France et la Fondation Aznavour, nous commencerons probablement à la fin du mois de mars à lancer l’appel par écrit sur différents supports et les rencontres physiques auront lieu début mai à Erevan. On verra en un mois combien de candidats seront inscrits et on fera un point en essayant de les rencontrer. Si le choix des 25 candidats est retenu au mois de mai, cela permettra aux candidats qui ne sont pas francophones de commencer à prendre des cours de français et d’acquérir une base.
Dans un premier temps je pense que c’est l’équipe de FrAmArt (Mikael Dovlatyan, Armen Baghdassaryan, Lusiné Abgarian et moi-même), qui rencontrera les premiers candidats et puis quand on affinera un petit peu, on pourra y intégrer Guillaume Narjollet, de l’Ambassade de France par rapport à la francophonie et Nicolas et Kristina Aznavour de la Fondation Aznavour, puisque le futur Institut Français sera accueilli par le Centre Aznavour. Cela se passera entre les trois partenaires principaux du projet, c’est-à-dire FrAmArt, l’Ambassade de France et la Fondation Aznavour.
Les partenaires principaux du projet sont les organismes français et francophones d’Arménie ou pas uniquement ? Et comment peut-on devenir partenaire de ce projet ?
Concernant les autres partenaires possibles et souhaitables, ce sont Le Ministère de l'éducation, des sciences, de la culture et des sports de la République d'Arménie, les fondations culturelles en lien avec l’Arménie, et les organismes institutionnels, en France, qui aident les étudiants des cycles supérieurs. Plus précisément, l’UGAB France, la Fondation Aurora, ainsi que d’autres organismes, s’ils veulent bien prendre en charge les bourses des candidats. Pour les stages en langue française en France, ce sont la Région Île-de-France et la Mairie de Paris qui seront les deux partenaires qui pourront prendre en charge et accueillir les candidats choisis pour faire des stages en langue française dans des conservatoires d’Art dramatique à Paris et en région parisienne.
Quels sont les résultats attendus à l’issu de ce projet ? Quel en serait l’impact ?
Ce serait un peu présomptueux de dire aujourd’hui quel sera alors le résultat attendu ou quel en sera l’impact mais je sens que ce projet a l’air de trouver sa place dans l’état actuel des choses en Arménie. L’Institut du théâtre et du cinéma d’Erevan sera, je pense, intéressé que ses étudiants se penchent sur la langue française et sur la francophonie en général. L’Ambassade de France en Arménie fait un travail exceptionnel par rapport aux jeunes qui ont besoin et qui ont la nécessité d’avoir des contacts autres que ce qui se passe dans leur propre pays. De rentrer dans l’apprentissage d’une nouvelle langue et de pratiquer leurs spécialisations dans une autre langue, ce qui permettra une ouverture encore plus grande à leurs métiers. La francophonie est aussi au cœur du projet…
Est-ce que le projet a tendance à se développer de façon pérenne ?
Oui, je souhaiterais vivement que le projet soit pérennisé, après le premier semestre, après le premier cursus et qu’on puisse en tirer les leçons peut-être pour améliorer la structure, augmenter le nombre de participants. On mesurera cela après la première expérience, mais le but est de pérenniser ce projet tous les semestres, en invitant des professionnels venant de France pour enseigner leurs savoirs une fois par mois durant les cursus.
Pour avoir des renseignements sur le dépôt des candidatures : candidature.framart@gmail.com
Pour contacter l’organisateur : www.serge-avedikian.com