Un camion de la Croix-Rouge arménienne s'est présenté hier au Lycée français Anatole France pour un premier chargement de l'aide humanitaire aux réfugiés du Haut-Karabagh initiée et collectée par les élèves.
Texte et photos par Olivier Merlet
« Toutes ces personnes déplacées qui fuyaient le Karabagh et arrivaient en Arménie sans rien… On était tous très choqués, on ne pouvait pas rester sans rien faire. On en a discuté entre nous et on est allé voir le proviseur pour lui proposer que nous organisions une collecte au sein de l'établissement ». Anahit, 16 ans, est élève de première en section française au Lycée français d'Erevan. L'initiative lui tenait peut être encore plus à cœur que d'autres. : la famille de sa tante est originaire de Stepanakert, elle a eu la "chance", elle, d'être évacuée par la Croix-Rouge pour raison de santé pendant le blocus, avant la panique.
Ce sont à peu près 75 à 80 élèves des sections arménienne et française du Lycée Anatole France qui ont pris ensemble cette initiative et organisé son déroulement, immédiatement encouragés et secondés par l'équipe administrative et enseignante.
« C'est une vraie mobilisation de l'ensemble de la communauté scolaire », se réjouit le proviseur, Christian Châle. « Même les plus jeunes, au collège ou au primaire voulaient absolument nous donner un coup de main ». Mais l'ampleur de l'opération a rapidement exigé une stricte organisation et une logistique efficace. Près d'une tonne de produits de première nécessité et de matériel d'urgence a déjà été collectée en une dizaine de jours et les dons continuent d'affluer.
« Lorsque nos lycéens sont venus ensemble nous demander comment pratiquer, nous avons tout d'abord décidé d'adresser un mail aux familles pour leur faire part de ce que nous mettions en place. Dès le lendemain matin à 7h30, avant les cours, les jeunes étaient dans l'établissement pour préparer la logistique d'accueil. Nous nous sommes rapprochés du ministère de la Santé qui nous a fait part de ses besoins en médicaments et nous a aiguillé vers d'autres ONG, en charge de l'assistance humanitaire aux déplacés du Karabagh. La Croix-Rouge arménienne nous a donné les coordonnées de ses partenaires. Il se trouve aussi que des parents d'élèves travaillent à la Croix-Rouge internationale, chez Médecins du monde, et de fil en aiguille… Le bouche à oreille, ça marche très bien ici ».
440 kilos rien qu'en denrées alimentaires : du riz, des pâtes, du thé, des gâteaux, plus 60 kilos de farine et 70 litres d'huile… Mais aussi des produits d'entretien et d'hygiène, de la lessive, du liquide vaisselle, des brosses à dents et du dentifrice, et encore des médicaments, du matériel de secours ainsi que des vêtements neufs et usagés. Tous les jours, des parents d'élèves, leurs proches ou leurs amis déposent leurs dons à la loge du lycée. Les produits sont ensuite triés par les élèves, conditionnés et empaquetés dans des cartons étiquetés… en arménien et en français.
La générosité des familles a été telle que la salle de classe spécialement bloquée pour l'opération n'y a pas suffi, le proviseur a même du mobiliser son propre espace de travail pour entreposer la marchandise. « Mon bureau est plein à craquer, une véritable épicerie ! » s'exclame encore Christian Châle, « la salle de tri aussi et nous avons demandé à la Croix-Rouge d'effectuer une première rotation. Elle nous a d'ailleurs fait part de ses difficultés à récupérer tout ce qui est équipement de literie, les couverture, les draps et cætera. Nous allons tenter de cibler la collecte en ce sens ».
Les équipes d'Anatole France ont porté une grande attention aux récipiendaires des fruits de leur action. Ce sont toutes des associations clairement identifiées avec "pignon sur rue", gage de sécurité quant à la destination finale des dons, pour que l'aide réunie arrive bien à ceux qui en ont réellement besoin.
Hier lundi, dans l'arrière-cour de l'école, les lycéens étaient fiers de charger eux-mêmes le camion de la Croix-Rouge. Pleins d'enthousiasme et d'énergie, ils assurent qu'ils poursuivront leur collecte tant qu'il y aura des besoins.