Rosatom a passé contrat avec la centrale nucléaire de Metsamor, le 26 mars, pour la fourniture et la modernisation du système de refroidissement de ses réacteurs… et s'échauffe pour la suite.
Par Olivier Merlet
Loin des discours politiques du premier sommet mondial sur l’énergie nucléaire la semaine dernière à Bruxelles, c'est de pragmatisme et de gros sous dont il est question depuis hier à Sotchi au 13eme forum international Atomexpo. En fin d'aprés-midi ce mardi, Rosatom, le géant russe du nucléaire a annoncé la signature avec "HAEK", la société d'exploitation de la centrale arménienne, d'un nouveau contrat de services d'un montant de 6 millions de dollars.
Il prévoit la conception, l'assemblage et l'installation d'un nouveau système de refroidissement des réacteurs de la deuxième tranche de Metsamor. Les travaux se dérouleront en deux phases au sein de la chambre de confinement, le cœur même de la centrale, pendant son arrêt prévu cette année pour le 15 mai. Ingénieurs et ouvriers spécialisés disposeront alors de 85 jours pour boucler la première partie de leur programme, la fin des travaux sera réalisée en 2025.
Moins d'une semaine après la déclaration de Nikol Pashinyan à Bruxelles appelant de nouveaux investisseurs à s'intéresser au marché du nucléaire arménien, la signature du contrat avec Rosatom n'est pourtant pas une surprise. Le groupe russe, constructeur de la centrale actuelle, est aussi en charge de son entretien et de sa mise en conformité aux normes internationales exigées par l'Agence atomique internationale (l'AIEA) dans le cadre de son exploitation récemment prolongée à l’horizon 2036. Eduard Martirosyan, président d'HAEK a ainsi déclaré que « quatre appel d'offres consécutifs » avaient été passé mais que « "Rosatom Service" était la seule organisation dont les normes strictes avaient permis de répondre aux exigences du cahier des charges ».
Échéance 2036
Lors d'un point de presse tenu la veille, toujours à Sotchi, ce dernier a cependant annoncé la création d'un groupe de travail interministériel au sein du gouvernement arménien, chargé de l'évaluation technique des propositions d'un certain nombre de pays pour la construction d'une nouvelle centrale nucléaire. « ll s'agit d'un grand projet qui nécessite une étude sérieuse tant au niveau de ses capacités énergétiques qu'au niveau du choix de l'emplacement. Des discussions sont actuellement en cours avec Rosatom et d'autres États » a-t-il déclaré, citant la Corée du Sud, la Chine, la France et les États-Unis. « Notre objectif est d'obtenir une station moderne et sûre, qui soit également compétitive en termes de prix ».
L'occasion était toute choisie pour Kirill Komarov, directeur général adjoint de Rosatom, lui aussi présent sur Atomexpo, pour affirmer que « Rosatom possède n'importe quelle technologie et nous sommes capables de mettre en œuvre n'importe quelle décision des dirigeants arméniens ». Se référant au programme SMR (mini-réacteurs) suggéré à plusieurs reprises par le Premier ministre arménien, Kirill Komarov a assuré « déjà produire en série des unités d'une capacité de 50 MW chacune. Nous avons des unités de 1 000 MW et nous allons bientôt commencer la construction d'un réacteur de 600 MW. Le prochain bloc à construire en Arménie ressort, bien sûr, de la décision du gouvernement arménien. Il suffit de ne pas se faire d'illusions et de comprendre qu'une centrale de faible puissance coûtera toujours plus cher qu'une centrale de grande puissance ».
Eduard Martirosyan, le directeur général de la centrale nucléaire arménienne, reste optimiste. Selon lui, huit à douze années d'attente sont nécessaires de la conception à la mise en service d'une nouvelle centrale nucléaire, le gouvernement arménien dispose donc encore de quatre années, dans le meilleur des cas, pour réfléchir et décider d'un projet, choisir son emplacement et contracter son fournisseur. En France, EDF vient d'annoncer un nouveau report de son programme EPR, portant à douze années le retard sur son lancement initialement prévu Rosatom, n°1 mondial pour la taille de son carnet de commandes à l’étranger cumule pour sa part les retards de livraison de ses chantiers, en Russie et dans le monde, et ce, avant même que la Russie n'entre en guerre avec l'Ukraine.