L'ex-enfant terrible du onze français et légende du football mondial, Nicolas Anelka, est arrivé hier à Erevan où il séjourne jusqu'au 20 janvier. Invité par la Chambre de Commerce et d'Industrie française en Arménie, il effectue un voyage d'étude, plus que sportif, même si, évidemment, le ballon rond demeure au fond de ses buts.
Texte et photos Olivier Merlet
Retraité des terrains depuis 2015, l'ancien attaquant de Chelsea (du PSG et du Real de Madrid) consacre depuis trois ans son talent et son expertise à la formation de jeunes joueurs. En juillet 2020, il lance à Tourcoing, dans le nord de la France, sa première académie de football, la NA 39, du nom de ses initiales et de son numéro fétiche, celui du maillot qu'il portait à Chelsea. En septembre de l'année passée, c'est tout au Sud de l'hexagone, à La Garde, près de Toulon dans le Var, qu'il récidive et ouvre, avec son ami boxeur Faïsal Arrami, un deuxième centre de formation.
« Avoir des footballeurs avec un mental de combattant ». C'est avec cet esprit et l'espoir d'y associer les jeunes passionnés et futurs espoirs d'Arménie que Nicolas Anelka a planifié son voyage, avec à la clef, peut-être, la création en Arménie d'une structure école - une académie de football - répondant à tous les critères et exigences de préparation sportive requis par les plus grands clubs internationaux.
Hier mercredi, la star était en visite au "stade Républicain Vazgen Sargsyan". Les juniors du club de football, l'attendaient de pied ferme… tous chaussés de crampons. Arborant fièrement leur tenue d'entrainement, rouges et noirs de pied en cap, une nuée de jeunes supporters entourait son idole. Short, chaussure, maillot, ballon ou simple bouts de papier, tout était bon pour recueillir l'autographe du champion, avec selfie de rigueur. Ils ont ensuite rejoint le centre du terrain pour rivaliser de dribbles et de passes sous les yeux connaisseurs du modèle qu'ils aspirent tous à devenir un jour, peut-être.
« C'est le rêve de tous ces enfants », reconnaît Anelka, « mais devenir joueur professionnel est un rêve difficile à atteindre. Nous pouvons leur offrir cette opportunité. C'est beaucoup de travail, de force de caractère, mais le plus important, c'est d'être heureux tous les matins de retrouver l'équipe et le terrain » . En aparté, l'ex-international confie que ce n'est pas son premier voyage en Arménie. En 1999, il avait fait le déplacement avec l'équipe de France et toute sa famille. « Aujourd'hui c'est une visite informelle, de reconnaissance », précise-t-il, « pour se rendre compte des infrastructures existantes et s'imprégner de la mentalité footballistique locale. Nous saurons alors ce que nous pouvons apporter, un fonctionnement différent de ce qui existe déjà, un peu plus européen, notamment en ce qui concerne l'aspect "parasportif" de l'activité : l'hygiène de vie, l'entretien des joueurs, les soins médicaux, tous les à-côté indispensables à la pratique du foot de haut-niveau. Transmettre aux jeunes cette vision, les préparer et leur montrer comment cela se passe quand ils y seront. Le potentiel est là et c'est déjà très positif ».
La chambre de commerce française en Arménie est à l'origine du voyage d'Anelka en Arménie. Son président, Tigran Arakelyan, entretient en effet des relations personnelles de longue date avec le joueur. « Anelka est ambassadeur du Paris-Saint-Germain, il a ouvert l'académie du PSG à Shanghai et à Hong Kong, l'idée de la création d'une académie de football en Arménie s'est imposée comme une évidence. Le football, c'est aussi de l'économie, c'est du business ! »
Avec des investissements très lourds dans les infrastructures et la formation des jeunes joueurs, le président de la CCIFA voit au travers d'un football arménien de meilleur niveau de vastes et nouvelles opportunités de développement économique. « Ouvrir une académie de football en Arménie pour y former et entraîner 300 ou 400 jeunes, c'est entre 5 et 7 million d'euros d'investissement. Si on arrive à tirer le football arménien vers les standards européens et le faire rayonner internationalement, de nombreux secteurs en retireront les bénéfices, le tourisme par exemple. Le football est créateur de liens, de connexions avec d'autres pays, commerciales aussi bien que sportives ». La Chambre française dit avoir déjà identifiée plusieurs entreprises prêtes à soutenir son initiative, via des financements ou des actions de sponsoring. Deux régions françaises auraient également manifesté leur souhait de participer au projet.
Autre affaire en cours : la chambre avait arrangé, plus tôt dans la matinée, un rendez-vous entre Nicolas Anelka et Sevag Djidjirian, dirigeant français établi en Arménie depuis plus de dix ans aux commandes de la société de textile "Texas production". Un protocole d'accord commercial a été conclu annonçant le lancement prochain d'une marque de sportswear. Des tenues de football et de sport "Made in Armenia" devraient être distribuées dans les clubs amateurs en France, y associant l'image d'Anelka et d'autres joueurs du onze tricolore. Tigran Arakelyan se dit même confiant de pouvoir convaincre Killian M'Bape, qu'il connait aussi, de se joindre à l'aventure.
Oubliant enfin le "foot-business", le président de la Chambre de commerce et d'industrie française en Arménie rappelle aussi l'intérêt humain du ballon rond, celui d'un nouvel espoir pour de nombreux jeunes arméniens. « Dans un pays qui a eu beaucoup de problèmes ces derniers temps, le sport, le football notamment, permet de passer à autre chose. De franchir pour beaucoup de jeunes une autre étape dans la vie, de s'affirmer psychologiquement, physiquement, d'aller de l'avant. C'est très important de développer le sport en Arménie ».
En quittant le stade Vazgen Sargsyan dans l'après-midi, Nicolas Anelka s'est rendu à Abovyan, non loin d'Erevan, à la rencontre de jeunes réfugiés d'Artsakh. L'occasion, là encore, d'une séance de dédicaces, de distribution de maillots et d'équipement sportifs. Ce matin, de nouveau, en compagnie de Narek Mkrtchyan le ministre des Affaires sociales, il a offert aux enfants d'un orphelinat un grand moment de joie et de bonheur.
Demain vendredi, retour au projet de l'académie NA 39 Arménie. Le champion doit passer une bonne partie de sa journée à en discuter les enjeux et modalités avec les cadres de la Fédération arménienne de football. Il devrait aussi disputer avec les joueurs du Pyunik une rencontre - démonstration tout à fait amical.