Ilham Aliyev - la menace revendiquée

Actualité
09.11.2022

Tout comme l'an dernier, c'est à Shushi, ville symbole, qu'Ilham Aliyev, treillis militaire sur le dos, a célébré devant ses troupes en parade le deuxième anniversaire de la victoire azerbaïdjanaise de la guerre des 44 jours.

Par Olivier Merlet

Plus encore que l'an dernier, intimidations, provocations, chantage et menaces explicites envers l'Arménie ont émaillé son discours, index tendu et poing serré. Deux jours plus tôt, Ilham Aliyev avait envoyé son ministre des Affaires étrangères à Washington négocier la paix. La paix du vainqueur, on s'en doutait déjà, mais laquelle ? Celle du 9 novembre 2020 ou celle à venir de celui qui fourbit encore ses armes sur les hauteurs de Jermuk ?

« L'armée azerbaïdjanaise aujourd'hui est plus forte que l'armée azerbaïdjanaise d'il y a deux ans, et tout le monde devrait le savoir. L'Arménie et tous les autres devraient le savoir ! »

Rappelant aux soldats rassemblés les réformes structurelles menées au sein de l'armée azérie au cours des 24 derniers mois, l'achat massif d'armements, de munitions et de «nouveaux équipements du plus haut niveau possible », Ilham Aliyev s'est félicité du « niveau record » du budget de l'État azerbaïdjanais pour 2023, « y compris des fonds alloués à des fins militaires». Pour lui « les forces revanchardes montent en Arménie », une Arménie à laquelle il reproche toujours de ne pas tenir ses engagements de la déclaration du 10 novembre 2020, de maintenir des forces armées au Karabakh et de ne pas encore avoir mis à sa disposition un couloir au travers du Zanghezur.

 « Immédiatement après la deuxième guerre du Karabakh, […] les districts d' Aghdam , de Kelbajar et de Lachin nous ont été restitués. S'il ne les avait pas rendus, nous leur aurions de nouveau fracassé la tête. Mais et ensuite ? […] Deux ans se sont écoulés, mais il n'y a pas d'étude de faisabilité, pas de mouvement, pas de chemin de fer, pas de route. Combien de temps sommes-nous censés attendre? Notre patience n'est pas inépuisable, et je tiens à les avertir à nouveau que si cette obligation n'est pas remplie, l'Azerbaïdjan prendra les mesures nécessaires ».

La justification de l'agression des 13 et 14 septembre était ainsi toute trouvée : « l'opération Farrukh, l'opération Revenge, les événements des 13 et 14 septembre à la frontière arméno-azerbaïdjanaise - tout cela devrait servir d'autre leçon pour l'Arménie. Nous espérons qu'ils la comprennent enfin, plient le cou et s'occupent de leurs affaires intérieures, ne se tournent pas vers nos terres, ne se tournent pas vers le Karabakh. Le Karabakh est notre terre. Les casques bleus russes y sont stationnés temporairement, la déclaration du 10 novembre 2020 précise leur mandat, et s'ils [NDLR : les Arméniens] comptent sur quelqu'un, ils feront face à une autre tragédie. »

Semblant faire fi de toutes les condamnations de la communauté internationale et des multiples demandes de retrait de ses forces armées du territoire arménien, le maître de Bakou poursuit : « Depuis l'opération des 13 et 14 septembre, les forces armées azerbaïdjanaises sont stationnées à des hauteurs stratégiques clés en direction de la frontière entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie. L'Arménie devrait comprendre ce que cela signifie. Nous pouvons maintenant voir les villes de Gugark , Kapan, Goris et Kelbajar depuis ces hauteurs stratégiques. Le lac Sevan est également à portée de vue. La plupart des postes arméniens sont visibles depuis les hauteurs que j'ai mentionnées, et s'il y a une concentration de forces là-bas, nous le verrons et agirons immédiatement. »

Réagissant au discours on ne peut plus belliqueux d'Ilham Aliyev, le président de la commission des Relations extérieures de l'Assemblée Nationale, Eduard Aghajanyan a affirmé que « les déclarations menaçantes de l'Azerbaïdjan ne peuvent influencer ou modifier les positions exprimées par la partie arménienne ».

Ce même 8 novembre, Ankara, par la voix de son ministère des Affaires étrangères, adressait un message de félicitations à « l'Azerbaïdjan frère », l'assurant de son « soutien total et inconditionnel pour accroître la sécurité et la stabilité dans tout le Caucase du Sud ».