20 juin, journée des réfugiés

L'édito du mois kasa
20.06.2020

Tout au long des longues, longues plaines, Peuple immense avance lentement.
Chants de joie et chants de peine, Peuple immense va chantant.

Par Monique Bondolfi, présidente de KASA

Ainsi commence un chant du Père Duval, qui enthousiasmait les jeunes francophones dans les années 60.

Les réfugiés ne sont-ils pas, précisément, ce peuple immense  qui avance lentement et péniblement sur les routes? En 2017 Amnesty International  nous livrait des statistiques crues, sans doute encore plus impressionnantes en 2020. 22,5 millions de réfugiés errent dans le monde, 1,2 millions ont besoin d’une réinstallation immédiate. Plus d’un million ont fui leur pays à cause d’un conflit ou/et de persécutions, quittant précipitamment la Syrie, l’Afghanistan et le Soudan du Sud…. Souvent de surcroît  pris en étau entre les intérêts des autres régions - Europe, USA, Russie, Turquie, Iran…

A considérer seulement le Moyen-Orient, 84% des réfugiés sont accueillis par des pays en voie de développement, à savoir la Turquie (3,2 millions), la Jordanie (2,8 millions), le Liban et le Pakistan (chacun 1,4 millions), l’Iran (1 million). Hormi l’Allemagne qui a le plus fort quota avec près de 900 mille réfugiés, la plupart des pays d’Europe défendent une politique restrictive, voire refoulent abondamment. Avec en tête les ex-pays de l’Est - Hongrie, Tchéquie… - alors même que l’Europe avait largement accueilli leurs citoyens en 1956 ou en 1968…

Pour ce qui regarde l’accueil des Arméniens de Syrie, l’Arménie se place en 3ème position dans la région après la Turquie et le Liban. Elle est très sensible à l’exode de ces frères qui, un siècle plus tard, refont en sens inverse le terrible chemin que parcoururent en 1915 Arméniens et Syro-chaldéens dans les conditions atroces que l’on sait. Mais même s’il s’agit de proches partageant même langue et même confession, l’intégration de ces Arméniens nés en pays arabe au sein d’Arméniens prioritairement marqués par la culture russe  exige doigté, respect réciproque et patience pour se reconnaître d’abord, s’apprécier ensuite.

Un apprivoisement qui est appelé à croître vu que les réfugiés les plus récents proviennent de tous les pays du monde, de sorte que l’Arménie longtemps largement monoethnique s’ouvre petit à petit à la diversité des races et des cultures.

KASA, fondation interculturelle, s’y emploie activement, forte d’un mandat du HCR (l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés), afin d’aider jeunes et familles de tous horizons à s’insérer dans leur nouvelle patrie tout en gardant leur identité. Et s’engage d’autant mieux que les réfugiés n’arrivent pas les mains vides. Comme le résume Filippo Grandi, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés «les réfugiés ont des compétences, des idées, des espoirs et des rêves. Ils sont également durs, résilients et créatifs, avec l'énergie et la volonté de façonner leur propre destin, si l'occasion leur est donnée».                 

Défi passionnant, bien dans l’esprit d’une Arménie qui ne saurait renier son légendaire sens de l’hospitalité et ne peut que se réjouir de cet apport de sang neuf!