Le 1er février 2021, les armées turque et azerbaïdjanaise ont commencé des manœuvres militaires conjointes, cette fois à Kars, en Turquie, à quelques dizaines de kilomètres seulement de la frontière avec l'Arménie. D’une durée de dix jours au moins, ces manœuvres font suite à celles réalisées il y a quelques mois en Azerbaïdjan ; peu après, la guerre contre l’Artsakh se déclenchait…
Les parallèles entre ces deux exercices militaires sont inévitables, d’autant plus que le commandement turc n’a pas hésité de marquer les buts à atteindre… avec des noms de localités arméniennes. Une opération d’intimidation ? Un avertissement lancé non seulement à l’Arménie mais aussi à la Russie dont la base militaire est située à la frontière turco-arménienne ? Difficile de déchiffrer, mais une chose est sûre : ces manœuvres au pied d’Ararat, la montagne qui symbolise l’Arménie et le peuple arménien, sont une déclaration supplémentaire de la domination de la Turquie dans la région mais aussi en Europe, ce que cette dernière refuse de voir…
L’Arménie sort tout juste de la guerre de 44 jours, et les esprits sont encore sous le choc, car cette guerre a détruit non seulement les vies et les biens matériels, mais aussi et surtout la confiance en l’avenir, en la possibilité même de continuer sa vie en Arménie.
Ce manque de confiance transparaît notamment dans le fait que les billets d’avions vers Moscou, qui a ouvert l’entrée aux citoyens arméniens pour la durée d’un mois, se vendent comme des petits pains, et ceci malgré leur prix, de trois à dix fois supérieur à la normale. Cette fuite, ce désespoir, ce sont autant des « effets collatéraux » de la récente guerre qui s’est soldée par une rude capitulation de l’Arménie, une capitulation dont les conditions et les conséquences demeurent inexpliquées.
Aujourd'hui, la Turquie joue avec l’Arménie comme un chat joue avec une souris coincée entre ses pattes. Est-ce une façon d’exercer de la pression sur l’Arménie afin de la rendre encore plus docile dans l’acceptation des humiliations infligées par l’accord tripartite arméno-russo-azerbaïdjanais ? Récupérer encore plus de villages arméniens qui n’ont rien à voir avec le territoire d’Artsakh ? Démoraliser définitivement et faire fuir la population ? La réponse à toutes ces questions est clairement oui.
Que faire alors dans ce contexte ? Continuer de vivre et de travailler avec encore plus d’entrain, sans oublier une seconde la réalité géopolitique dans laquelle se trouve le pays. Continuer de renforcer l’économie, sciée jusqu’à la racine à la suite de la pandémie et de la guerre. Et surtout, continuer de venir s’installer en Arménie, car ce que ses voisins veulent, c’est un pays en bon état mais vide.
Plus que jamais, c’est à la diaspora de se mobiliser pour préserver ce morceau de terre qui reste de l’Arménie historique, au lieu de pleurer « la grande Arménie » perdue. Sous peine de rejoindre le destin des autres peuples anciens, tels les Assyriens, dispersés dans le monde et coupés définitivement de leur berceau.
Plus que jamais, c’est le moment de vivre en Arménie. Et d'agir pour l'Arménie.