Selon le directeur du Service régional de Protection sismique, le séisme en Turquie n'affectera pas la situation sismique en Arménie

Actualité
08.02.2023

Près de 48 heures après le tremblement de terre qui a frappé la Syrie et la Turquie le 6 février, le bilan ne cesse de s'alourdir. Une équipe arménienne est partie, hier mardi, prêter main forte aux secours internationaux dépêchés sur place. On parle déjà en cette fin de mercredi de plus de 7500 morts, un chiffre loin d'être définitif.

Par Olivier Merlet

Interrogé par plusieurs médias arméniens, Sergeï Nazaretyan, membre de l'Académie d'Ingénierie géophysique d'Arménie, professeur émérite à l'institut Nazarov de sismologie et directeur exécutif du Service régional de Protection parasismique, affirme que l'éloignement de l'épicentre du tremblement de terre laisse le territoire arménien à l'abri de toute menace et ne peut avoir d'impact sur la situation sismique locale. « Selon les dernières mises à jour du réseau turc, le tremblement de terre a été mesuré à une magnitude de 7,8 sur l'échelle de Richter, environ 11 sur l'échelle MSK. À titre de comparaison, le tremblement de terre de Spitak était de magnitude 7 » rappelle -t-il.

« Si l'on considère la profondeur du séisme actuel, estimée entre 7 et 10 km, l'ampleur de la destruction ne peut être que massive. Il a englobé tout le territoire syrien et la zone de destruction a atteint Alep. Les conséquences sont également très graves pour la Turquie, tant en termes de pertes humaines que de dégâts matériels. Le nombre de victimes est pour l'instant rapporté au nombre de corps retrouvés. Le nombre de morts va encore augmenter. La province du Hatay à l'ouest d'Alep a été particulièrement touchée », déplore le sismologue, précisant que le tremblement de terre qui a eu lieu lundi a été causé par d'importantes secousses le long de la faille de l'Anatolie orientale qui s'étend de Chypre à la Géorgie.

« La faille d'Anatolie orientale est connue pour son potentiel à provoquer de puissants tremblements de terre. Elle donne aussi naissance à la faille d'Anatolie du Nord. Aucune des deux ne traverse le territoire actuel de l'Arménie. Une petite partie des branches issues de la faille nord-anatolienne entre vers Gyumri depuis Ani, zone de l'épicentre du tremblement de terre de Spitak en 1988, mais il est très peu possible et même improbable que ces fractures se réactivent aujourd'hui et provoquent un fort séisme en Arménie » rassure le directeur exécutif du Service régional de Protection parasismique.

Sergeï Nazaretyan souligne par ailleurs que l'Arménie est éloignée de l'épicentre du dernier séisme, sans impact sur sa propre situation sismique ni menace pour le territoire arménien. Il ajoute cependant que de forts tremblements de terre se produisent sur le territoire arménien « depuis des millions d'années et continueront à se produire car il s'agit de processus géologiques en constante évolution ». Il note ainsi que la zone de l'épicentre du tremblement de terre de Spitak, en constante activité, produit encore de fréquentes répliques.

« Nous avons une sismicité dispersée : nous avons eu des tremblements de terre à Shorzha, près d'Erevan, dans le sud de l'Arménie, pendant que la zone sismique active de Javakh est activité constante. C'est une zone unique avec le plus grand nombre de tremblements de terre enregistrés dans le Caucase, mais heureusement avec de faibles intensité la plupart du temps. » L'expert déclare encore que tous les moyens et systèmes de surveillance sont mobilisés pour contrôler la situation sismique en Arménie, quels qu'en soient les indicateurs, géophysiques, géochimiques et hydrodynamiques, en cas de détection d'anomalies, des prévisions sont établies respectivement et communiquées aux autorités responsables.

Quant aux rumeurs et croyances qui se répandent selon lesquelles il pourrait y avoir un tremblement de terre le même jour chaque année (c'était le cas en février 2021 et 2022), Nazaretyan les qualifie de fantaisistes et rétorque qu'il est faux de parler de la périodicité des tremblements de terre. Il a mentionné qu'il y avait eu quatre tremblements de terre majeurs sur le territoire de l'Arménie au XXème siècle, chacun séparés de longues périodes de durées différentes. Selon le spécialiste, il n'existe aucun modèle pertinent de prévision basé sur la fréquence et la périodicité.