Le ministère des Affaires étrangères appelle à « l'évaluation sans équivoque » des « menaces de génocide » du président azerbaidjanais

Actualité
30.05.2023

Alors que pourparlers de paix et négociations aux plus haut niveau battent leur plein, un discours pour le moins belliqueux du maitre de Bakou suscite une interrogation plus que légitime. Le gouvernement arménien demande des explications.

Par Olivier Merlet

 

Tandis que l'Arménie fêtait ce 28 mai le 105eme anniversaire de la constitution de sa première République, Ilham Aliyev, depuis Shushi y allait de ses violentes et malheureusement habituelles diatribes contre les Arméniens. Sa cible cette fois concernait très particulièrement les citoyens du Karabagh, leur suggérant «de jeter à la poubelle les "attributs de l'État fantoche" de dissoudre le parlement et de se soumettre aux lois de l'Azerbaïdjan. […] Les rêves d'indépendance du Karabagh sont allés là où le statut est allé et nous avons envoyé le statut au bon endroit pendant la seconde guerre», a-t-il ajouté.

En marge de la présentation à l'Assemblée nationale du rapport 2022 sur le budget de l'État, Nikol Pashinyan, lundi 29 mai, a longuement réagi à ces propos pour le moins violents et belliqueux, en totale contradiction selon lui avec les engagements pris à Bruxelles il y a deux semaines. Il s'est adressé nommément à son ministre des Affaires étrangères afin qu'il obtienne les clarifications nécessaires de la part des autorités azerbaidjanaises.  « Tant l'Azerbaïdjan que les partenaires internationaux devraient au moins clarifier si cela signifie renoncer aux accords conclus à Bruxelles. Et, je pense, monsieur Mirzoyan, que nous avons vraiment besoin d'obtenir une réponse à cette question de la part de nos collègues, car si cela signifie une renonciation, […] nous devons faire des ajustements supplémentaires ici afin de planifier également nos actions futures ».

Par la même occasion, le Premier ministre coupait court aux spéculations nées vendredi dernier suite à l'annonce visiblement prématurée par l'ambassadrice d'Azerbaïdjan à Paris, Leyla Abdullayeva, de la signature du traité de paix entre l'Arménie et son pays le 1er juin à Chisinau.

Dans la soirée, le ministère des Affaires étrangères publiait un communiqué demandant à la communauté internationale de noter « que les dirigeants azerbaïdjanais continuent de violer et d'ignorer les accords précédemment conclus […], ainsi que les principes fondamentaux du droit international.

[…] En réponse à l'engagement écrit de s'abstenir de recourir à la force ou à la menace de la force pris dans la déclaration tripartite de Sotchi le 31 octobre, des engagements verbaux similaires pris à plusieurs reprises dans d'autres plateformes, ainsi que les négociations en cours sur la réglementation des relations bilatérales relations, le président azerbaïdjanais menace à nouveau la République d'Arménie de recourir à la force et la population du Haut-Karabakh de nettoyage ethnique. En témoignent ses propos récents selon lesquels, en contrôlant le corridor de Latchine, l'Azerbaïdjan a perturbé la connexion entre le Haut-Karabakh et l'Arménie et menace ouvertement de procéder à un nettoyage ethnique si les Arméniens du Haut-Karabakh ne « tirent pas les leçons » du blocage du corridor de Latchine.

«Au lieu d'entamer un dialogue avec les représentants du Haut-Karabakh dans le cadre du mécanisme international, le président azerbaïdjanais les menace de représailles et de poursuites pénales. Dans le même temps, il est démontré que l'Azerbaïdjan ne veut pas résoudre les problèmes existants, mais avancer sur le principe "il n'y a pas d'Arméniens du Haut-Karabakh, il n'y a pas de problème du Haut-Karabakh". Une telle façon de travailler contredit également la logique des négociations en cours.

La reconnaissance de l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan ne peut être interprétée comme l'autorisation de procéder à un nettoyage ethnique contre la population du Haut-Karabakh. La République d'Arménie attire l'attention de la communauté internationale, y compris des acteurs de la médiation, sur le fait que le président azerbaïdjanais, par sa déclaration, prépare le terrain pour une nouvelle action agressive contre la population du Haut-Karabakh et la prive de la droit de vivre librement, en toute sécurité et dans la dignité dans leur patrie.

Il convient de noter que le président azerbaïdjanais non seulement profère des menaces de génocide contre la population du Haut-Karabakh, mais remet également en question l'indépendance et l'intégrité territoriale de l'Arménie. En fait, le président de l'Azerbaïdjan défie toute la société civilisée en menaçant d'occuper par la force de nouveaux territoires souverains de l'Arménie.

En concluant son communiqué sur l'assurance que « l'Arménie est résolue dans la voie qu'elle a choisie pour instaurer la paix dans la région », le ministère des Affaires étrangères appelle « tous les partenaires intéressés par la paix et la stabilité du Sud-Caucase à présenter des évaluations sans équivoque [des propos tenus et de la situation créée, NDLR] ».