BuildUp : le "top-expert" des informaticiens arméniens en libre partage

Société
04.02.2022

Ils sont des centaines, peut-être des milliers d'Arméniens à exceller dans le domaine de l'informatique. Les géants mondiaux du secteur, les Google, Amazon, Oracle, Microsoft, et autres Snapchat ne s'y sont pas trompés qui les emploient régulièrement et reconnaissent souvent en eux de véritables talents du plus haut niveau.

Par Aram Gareginyan

Ces experts ont récemment décidé, dans une démarche collective, de réunir leur expérience et compétences afin de les transmettre gratuitement à leurs collègues d'Arménie. Leur initiative, "BuildUp", consiste en une plateforme de formation intra-communautaire (de type “peer-to-peer”), animée non par des professeurs à temps plein, mais par des professionnels en activité, développeurs de logiciels, spécialistes du marketing numérique ou de la gestion de projets. Sur le modèle bien connu en France de "l'École 42", fondée par Xavier Niel, ils dispenseront gracieusement des cours du soir, après leur journée de travail, à cette différence près qu'ils ne concerneront qu'un public déjà aguerri à la pratique informatique. « Nos cours sont volontairement destinés à un public de professionnels expérimentés de niveau supérieur, plutôt qu'à des débutants qui disposent déjà en Arménie de nombreux centres de formation adaptés à leurs besoins », précise Nari Hakobyan, l'une des initiatrices du projet.

Les participants seront sélectionnés au cours des prochaines semaines. Ils devront répondre à un certain nombre de critères, dont la justification d'au moins deux à trois années d’expérience, et passer au préalable un examen de leurs compétences professionnelles. Les formations de ce niveau sont généralement très coûteuses, souvent plusieurs milliers de dollars. Grâce à "BuildUp", les étudiants ne débourseront pas le moindre centime.

Des intervenants du monde entier, des Etats-Unis, de Suède, de France ou de Russie dispenseront leurs cours en direct ou "hors ligne", organisés en "bootcamp", des séances théoriques de formation extrêmes, intensives, couplées à la conception et à la réalisation de projets tout à fait concrets. Les participants seront regroupés par équipes qui développeront chacune leur propre logiciel. Les versions "beta" ou finales seront ensuite testées sur Product Hunt, l’une des plus grandes plateformes de partage de logiciels, voire directement par leurs utilisateurs. « Notre objectif est que chaque projet devienne "Produit du jour" sur Product Hunt », dit Arman Grigoryan, l’un des dirigeants de la filiale arménienne d’Adobe et "Mentor BuildUp " spécialisé en gestion de projets.

Le souhait des fondateurs est de donner encore plus d'essor à l’industrie locale du logiciel dont les ressources humaines constituent l'atout le plus précieux. De retour en Arménie après avoir travaillé plusieurs années chez Google en tant que stratégiste du marketing digital, Nari affirme que les besoins des entreprises arméniennes du secteur nécessitent l'emploi de trois à cinq mille techniciens.

À l'avenir, en plus de l’informatique pure, le programme "BuildUp" pourrait intégrer des formations en ingénierie électronique (la partie “hardware”) pour laquelle le défi de la main d’œuvre est encore plus crucial, complétant ainsi l’offre arménienne dans le secteur des hautes-technologies, l'une des meilleures sur la scène internationale. Les filiales délocalisées de National Instruments, Dassault Systèmes et d’autres entreprises en profitent déjà en employant des ingénieurs arméniens.

« C'est l'une des priorités parmi nos formations à venir » dit Albert Poghosyan, responsable de projet. « Le "hardware" est justement plus "hard" à concevoir, parce qu’il exige davantage de ressources et le suivi en ligne des programmes est très délicat. Mais c’est important d'y penser dans le cadre de nos futurs développements ».

Un petit détail enfin quant à l'esprit de cette initiative : au fil de leurs études et de leur montée en compétence, les participants seront invités à devenir eux-mêmes mentors des nouveaux apprenants, contrepartie symbolique de leur dette morale envers la communauté professionnelle.