Le chassé-croisé de communiqués et de déclarations officielles succédant à l'annonce par le conseil européen, de la rencontre Pashinyan, Michel et Aliyev à Bruxelles le 6 avril laisse présager d'importants développements sur l'avenir du Karabagh et les relations arméno-azéries dans les prochains jours.
Par Olivier Merlet
Erevan
C'est Nikol Pashinyan qui a ouvert ce ballet diplomatique en tenant jeudi matin 31 mars un discours à la nation devant les membres de son cabinet. Rappelant la volonté réitérée de la République d'Arménie de signer un accord de paix avec l'Azerbaïdjan, le Premier ministre a précisé que la réponse de son gouvernement à la proposition en cinq points transmise par l'Azerbaïdjan « par les voies publiques et diplomatiques , […] signifie que le principe de reconnaissance mutuelle de l'intégrité territoriale et de l'inviolabilité des frontières est acceptable pour l'Arménie […] L'Arménie a proposé de retirer ses troupes de la frontière arméno-azerbaïdjanaise de l'ère soviétique, de confier la protection de cette frontière à un nombre limité de gardes-frontières [ainsi que] de lancer un mécanisme international de surveillance de la situation frontalière. Nous avons proposé plusieurs options de ce type, y compris à l'Azerbaïdjan, et nous accepterons toutes les options que l'Azerbaïdjan acceptera. »
Nikol Pashinyan s'est également exprimé sur la question du Karabakh : « la position de l'Azerbaïdjan est qu'il n'y a pas de problème du Haut-Karabakh, il est déjà résolu. Cette position de Bakou ne répond pas à une question importante. Et comment la question des droits des Arméniens du Haut-Karabakh a-t-elle été résolue dans cette affaire ? En substance, l'Azerbaïdjan tente d'expulser tous les Arméniens du Haut-Karabakh, considérant ainsi la question comme close. » Revenant sur l'escalade militaire de la semaine dernière, il a fait remarquer que « l'incursion des forces armées azerbaïdjanaises dans le Haut-Karabakh se poursuit dans le cadre des attributions de la force de maintien de la paix russe. Nous espérons également que les actions des soldats de la paix que j'ai mentionnées pendant ou après l'invasion, ou leur éventuelle inaction, feront l'objet d'une enquête appropriée. » En outre, selon lui, le but apparent des exactions de l'armée azerbaïdjanaise « est d'achever la politique de nettoyage ethnique des Arméniens du Haut-Karabakh ».
Le Premier ministre a enfin assuré que « L'Arménie propose des solutions concrètes et logiques en termes de démarcation et de délimitation [des frontières], d'ouverture des communications régionales et excluant l'escalade militaire au Haut-Karabakh. J'exprime une fois de plus la volonté de la République d'Arménie de signer un accord de paix avec l'Azerbaïdjan. L'Arménie est prête pour le démarrage immédiat des pourparlers de paix. Le président du Conseil de l'UE, Charles Michel, le président de l'Azerbaïdjan et moi-même devons nous rencontrer à Bruxelles le 6 avril. Et j'espère qu'au cours de cette réunion, toutes les questions liées au début des pourparlers de paix seront discutées et convenues avec le président azerbaïdjanais. »
Bakou
Au même moment, en préalable à un entretien avec le président en exercice de l'OSCE, (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), Zbigniew Rau, le président azerbaïdjanais, Ilham Alyev s'exprimait sur le rendez-vous de Bruxelles « [espérant] que cette réunion sera productive. Il y a déjà eu plusieurs réunions et nous devons avancer vers la paix entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie et signer un accord de paix au plus vite. ». « Le conflit a déjà été résolu. L'Azerbaïdjan l'a résolu lui-même et il est maintenant temps de normaliser les relations entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie. J'ai été récemment informé que l'un de ces messages est qu'ils considèrent nos propositions comme acceptables. C'est une très bonne nouvelle et j'espère que cette question sera clarifiée lors de la réunion de Bruxelles. » Zbigniew Rau a de son côté fait part de son espoir que les relations entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie reviendraient à la normale, notant que l'étape actuelle menant à un règlement semblait très optimiste.
Moscou
Enfin, dans l'après-midi, le service de presse du Kremlin annonçait les échanges téléphoniques de Vladimir Poutine avec Nikol Pashinyan d'une part et Ilham Aliyev d'autre part. « L'évolution de la situation dans la région du Haut-Karabakh a été discutée, en mettant l'accent sur la résolution des questions pratiques visant à assurer la sécurité et la stabilité dans la région. Il a été rappelé l'importance de la mise en œuvre des accords trilatéraux du 9 novembre 2020, du 11 janvier et du 26 novembre 2021. De nouveaux contacts pourraient éventuellement avoir lieu ultérieurement.
Vienne
Zbigniew Rau, ministre des Affaires étrangères polonais et actuel président en exercice de l'OSCE effectue actuellement une tournée des capitales du Sud-Caucase visant à promouvoir la coopération pacifique, le dialogue et la stabilité dans le Caucase du Sud. Après s'être rendu à Tbilissi, puis à Bakou, il était attendu à Erevan en fin de journée et devrait s'entretenir aujourd'hui avec Ararat Mirzoyan, Vahagn Khachatryan le nouveau président de la République et Nikol Pashinyan.