
Le street art, c’est de l’art exposé dans « le plus grand musée du monde : la rue », rappelle Nicolas Laugero-Lasserre, commissaire d’exposition Paris - Erevan art urbain, aux côtés d’Aram Zurabyan. Tout a commencé en 2023, avec l’exposition « Capitale(s) : 60 ans d’art urbain à Paris », première rétrospective d’envergure consacrée au street art en France. En la visitant, Aram Zurabyan trouve l’inspiration pour imaginer une exposition similaire au NPAK.
Par Béatrice Ramos
Considéré comme le plus grand mouvement artistique du XXIᵉ siècle, l’art urbain est engagé, démocratique par essence et accessible à toutes et à tous. Par la diversité de ses techniques et par l’audience qu’il touche, il s’impose aujourd’hui comme un véritable phénomène.
Le street art est arrivé à Paris dans les années 1980. L’exposition Paris - Erevan art urbain revient justement sur cette histoire, retraçant l’évolution du mouvement depuis les pionniers jusqu’aux figures contemporaines.
Soutenue par le ministère de l’Éducation, de la Science, de la Culture et du Sport de la République d’Arménie ainsi que par l’Institut français en Arménie, cette exposition s’inscrit dans le cadre du festival Street Art 2025, qui rassemble de nombreux événements culturels à travers le pays, parmi lesquels la réalisation à Aparan d’une fresque murale du street artiste français Bault en collaboration avec de jeunes participants.
Dans l’imaginaire collectif, l’art de rue reste encore souvent associé au vandalisme. Pourtant, sa force réside précisément dans sa liberté, son absence de règles et de limites. Pour Aram Zurabyan : « Cette approche donne aux individus un espace d’expression si vaste qu’il peut recouvrir tous les espaces qui nous entourent. Il faut protéger cette forme d’art et permettre aux gens de comprendre qu’elle est légitime ».
Au NPAK, le street art est donc présenté dans un espace institutionnel, associé traditionnellement à l’art contemporain. Ce déplacement du mur de la rue au mur du musée illustre le rôle des institutions dans la reconnaissance progressive du street art.
Pour cette exposition, 20 artistes parisiens ont été sélectionnés, aux côtés de 3 artistes arméniens. Le choix reflète une volonté de montrer la diversité générationnelle et stylistique de ce mouvement. Le terme « artistes parisiens » ne désigne pas uniquement des créateurs nés ou installés à Paris : il inclut aussi des artistes venus d’ailleurs mais qui ont marqué la capitale par leurs interventions.
Les trois artistes arméniens exposés sont :
- Siranush Aghajanyan, figure incontournable du street art à Erevan.
- Taron Manukyan, actif depuis plus d’une dizaine d’années, l’un des plus expérimentés en Arménie.
- Mariam Energetic, jeune artiste en plein essor.
« La présence d’artistes arméniens dans une telle exposition constitue une étape importante pour rendre l’art contemporain plus visible et renforcer sa présence dans les espaces artistiques internationaux. » — Aram Zurabyan.
Au NPAK, les visiteurs découvrent à la fois des œuvres in situ, réalisées sur les murs du centre par les artistes arméniens, et des œuvres d’atelier, produites par les artistes parisiens. Cette distinction rappelle que si le street art est avant tout un art de l’espace public, ses créateurs sont aussi peintres, sculpteurs ou dessinateurs capables de transposer leur langage en galerie.
D’août à décembre 2025, Paris - Erevan art urbain propose donc de réunir sur un même lieu les œuvres d’artistes parisiens et arméniens. Aux côtés d’Aram Zurabyan, Nicolas Laugero-Lasserre — déjà commissaire de l’exposition parisienne — coproduit le projet et prête une partie de sa collection. On y retrouve notamment des œuvres de Banksy, Jace, Bault, Kraken et bien d’autres figures internationales qui ont marqué les rues de Paris et du monde.
Avec cette exposition, le NPAK réaffirme pleinement sa vocation : favoriser le dialogue entre artistes locaux et internationaux. Elle marque aussi une étape décisive pour le développement du street art en Arménie.
En présentant des artistes arméniens aux côtés de figures parisiennes, l’exposition agit comme un tremplin, propulsant leur notoriété et leur ouvrant de nouveaux espaces d’expression. Mais au-delà de la reconnaissance des artistes, l’enjeu est plus vaste : inviter le public à voir la ville autrement, à lire les messages, critiques, protestations et poésies que le street art dépose dans nos rues, et à interroger le monde qui nous entoure à travers le prisme de l’art.