Le ministre des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, participait hier 1er décembre, à Lodz en Pologne, au Conseil ministériel de l'OSCE, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe dont dépend le groupe de Minsk. A Moscou, Sergei Lavrov tenait une conférence de presse sur les questions de sécurité en Europe.
Par Olivier Merlet
« Dans les circonstances actuelles où l'Azerbaïdjan dissimule son recours à la force contre l'Arménie en lançant des jeux de blâme, la présence internationale sur le terrain et une attitude claire envers l'agression et l'État agresseur sont plus importantes que jamais » a déclaré le ministre des Affaires étrangères, exprimant la satisfaction et « le soutien supplémentaire de l'Arménie aux missions déployées sur le terrain par l'Union européenne et l'OSCE ». Il avait auparavant souligné, devant les représentants des pays membres de l'Organisation, la situation critique à laquelle devaient faire face l'Arménie et le Karabakh. « Nous sommes confrontés à un recours continu à la force et à la menace de recours à la force ».
Rappelant que depuis l'agression de septembre, l'armée Azerbaïdjanaise continue d'occuper 140 km2 du territoire arménien, poursuit toujours ses exactions contre la souveraineté et l'intégrité territoriale de l'Arménie, et qu'elle « a procédé en fait au nettoyage ethnique d'une autre colonie du Nagorny Karbakh », a estimé Ararat Mirzoyan condamnant la volonté délibérée de Bakou « d' entraver le fonctionnement du corridor de Lachin, "mode de vie" de plus de 120 000 personnes ». Le ministre des Affaires étrangères a toutefois assuré de « la volonté politique et des mesures décisives [du Gouvernement arménien] pour ouvrir une nouvelle ère de paix et de stabilité dans le Caucase du Sud ».
« Nous continuons de croire que l'OSCE, les pays coprésidents du Groupe de Minsk, les mécanismes de l'OSCE avec leurs connaissances et leur expérience accumulées peuvent et doivent contribuer à promouvoir la stabilité et à établir une paix durable dans notre région », a conclu Ararat Mirzoyan.« Personne ne se souvient du Groupe de Minsk de l'OSCE aujourd'hui » déclarait au même moment Sergeï Lavrov depuis Moscou; au cours d'une conférence de presse consacrée aux questions de sécurité européenne. « Parfois, en Arménie, une personnalité politique transmet quelque chose à son sujet, mais les Français et les Américains ont enterré le groupe de Minsk. Nous n'avons rien à voir avec cela ». Réponse "du berger à la bergère". Usant de la causticité qui lui est souvent propre, le chef de la diplomatie russe a poursuivi : « Les Français, les Américains et l'Union européenne tentent de compenser le groupe de Minsk enseveli en "se faufilant" dans les efforts de médiation [entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan]. Ils cherchent à "récupérer" et à privatiser les accords conclus avec la participation russe. Par exemple, ils tiennent une réunion de la commission sur la délimitation des frontières à Bruxelles. Les Arméniens et les Azerbaïdjanais sont des gens polis, ils viennent, mais comment peut-on discuter de délimitation sans avoir entre les mains des cartes des anciennes républiques soviétiques qui n'existent que dans l'état-major russe ? ».
Sans plus d'ironie cette fois, le ministre des Affaires étrangères russes a fait part de sa vision du processus de paix accompagné par l'Europe :
« ils [les Arméniens et les Azerbaïdjanais] se sont rendus à Prague et y ont signé un document stipulant qu'un traité de paix devrait être basé sur les frontières conformément à la Charte des Nations Unies et à la Déclaration d'Alma-Ata. Cette dernière stipulant et confirmant l'inviolabilité des frontières dans les limites qui existaient entre les républiques de l'Union soviétique. À cette époque, la région autonome du Haut-Karabakh faisait partie de la RSS d'Azerbaïdjan. L'Azerbaïdjan, l'Arménie, la France et le Conseil européen, représenté par Charles Michel, l'ont approuvé dans le cadre du document. Cela facilite la poursuite des travaux et résout la question de savoir comment aborder le statut du Karabakh.
Sergeï Lavrov y voit là la raison pour laquelle, « les dirigeants arméniens », depuis plusieurs mois, avaient préféré privilégier les négociations sur la garantie les droits de la population arménienne du Karabakh plutôt que celle de son statut. Lavrov a également révélé que le choix de reporter cette question "pour plus tard", c'est à dire aux générations futures, avait déjà été posé sur la table il y a dix ans et envisagé de nouveau lors de la discussion qui avait abouti à l'accord du 9 novembre. « Après avoir signé l'accord de Prague, nos collègues arméniens nous demandent maintenant de confirmer les propositions russes sur le statut du Karabakh. Cela ne ressort pas de "l'opéra" de la négociation, mais d'une perspective qui n'y a rien à voir ».