L'exemption du visa européen sera negociée à Bruxelles avec Erevan

Actualité
18.07.2024

Sept ans après la signature de l'accord de partenariat global et renforcé entre l'Union européenne et l'Arménie, les 27 membres du Comité des représentants permanents du Conseil de l'Europe ont approuvé, hier 17 juillet, l'ouverture des négociations sur la libéralisation des visas avec l'Arménie.

Par Olivier Merlet

 

Le texte de la décision officielle n'est malheureusement pas rendu public. Citant des sources diplomatiques, Rikard Jozwiak, rédacteur en chef des questions européennes pour " RFEL -Azatutyun- ", rapporte qu'après l'approbation des 27 États membres, la question sera soumise au Conseil de l'Union Européenne pour approbation formelle, puis elle sera transmise à la Commission européenne, son organe exécutif, qui annoncera exactement quand elle entamera les négociations et quel plan d'action elle envisage avec Erevan.

 Bruxelles demande généralement six mois pour élaborer et présenter le plan d'actions qu'elle réserve à chaque pays, mais suite aux élections de juin, la nouvelle Commission européenne n'etant toujours pas constituée, ce délai pourrait encore s'allonger. Autant dire que pour le simples citoyen arménien, l'exemption de visa n'est pas pour demain, elle ne sera effective que lorsque l'Arménie aura pleinement respecté toutes les normes nécessaires.

En règle générale, Bruxelles avance quatre revendications principales, de la gestion des frontières à la lutte contre le crime organisé et la corruption. « Il y a un mouvement général en Europe où les gens ont peur de l'immigration irrégulière. Certains pays, notamment la Suède, l'Autriche et les Pays-Bas, sont très prudents lorsqu'il s'agit d'accorder la libéralisation des visas à d'autres pays. L'affaire est donc loin d'être gagnée », affirme le journaliste. Il ajoute : « Il s'agit de la sécurité des documents, des frontières, mais aussi de questions relatives aux droits fondamentaux. C'est tout un dossier de centaines de pages qui doit être rempli par l'Arménie et des rapports annuels sur les mesures prises devront être présentés pendant plusieurs années. Dans le cas de certains pays, la Moldavie, par exemple, il a fallu plus de 3 ans, 5 pour la Géorgie et 9 pour l'Ukraine, les négociations avec la Turquie durent depuis plus de 10 ans. Chaque pays suit ce chemin différemment »

Actuellement, une soixantaine de pays ont la possibilité d’entrer dans l’Union européenne sans visa pour une durée maximum de 90 jours sur une période de 180 jours. En cas de violation continue de cette exigence et d'échec de la poursuite d'autres réformes, Bruxelles peut annuler le régime d'exemption de visa. La question est d'ailleurs en cours de discussion concernant la Géorgie.

Vis-à-vis d'Erevan, les dirigeants de l'Union européenne se sont d'abord engagés à entamer des discussions sur la libéralisation des visas lors du sommet du Partenariat oriental avec l'Arménie de 2017. Cet engagement faisait suite à la signature d'un accord de partenariat global et renforcé (CEPA) entre l'UE et l'Arménie. L'actuel et l'ancien gouvernement arménien ont depuis pressé les 27 de fixer une date pour l'ouverture des pourparlers. En 2020, Andrea Wiktorin, alors chef de la délégation européenne à Erevan, déclarait que les discussions formelles sur l'exemption de visa étaient entravées par le fait que « plusieurs  pays européens étaient encore préoccupés par le grand nombre de demandeurs d'asile arméniens sur leur sol ».

La décision rendue hier par les États membres intervient alors que le gouvernement arménien s'efforce de se rapprocher de l'Occident dans un contexte de tensions croissantes avec la Russie. Elle montre que Bruxelles n'y est pas insensible mais les discussions sur une éventuelle adhésion à l'Union européenne n'en sont encore qu'au tout début. En février dernier, le Haut représentant pour les Affaires étrangères et la sécurité en Europe, Josep Borrell, avait annoncé le lancement des travaux sur « un nouveau programme ambitieux de partenariat UE-Arménie ». À Erevan, fin juin, une journée de débat avait eu lieu au Parlement, plusieurs députés appelant a la tenue d'un referendum populaire sur la question.