À l'issue des entretiens entre Ararat Mirzoyan et Sergeï Lavrov le 20 mars, le ministre russe des Affaires étrangères a fait part de ce qu'il considérait comme des obstacles au règlement pacifique de la situation dans le Sud-Caucase et en a clairement désigné les responsables.
Par Olivier Merlet
« Les États-Unis, l'Union européenne, l'Alliance de l'Atlantique Nord. Dans l'ensemble, ils se livrent à ce que j'appellerais des « razzias diplomatiques » : ils essaient de "soumettre" les accords trilatéraux entre la Russie, l'Arménie et l'Azerbaïdjan, d'imposer leur "curatelle" à tout ce travail, sapant directement les principes clés des documents qui impliquent la participation active de la Fédération de Russie dans la résolution des problèmes […] et l'assistance aux parties dans la signature d'un traité de paix ». La déclaration du ministre russe des Affaires étrangères n'est pas réellement une nouveauté et reprend les éléments de langage adoptés par son administration depuis plusieurs semaines pour dénoncer ce qu'elle assimile à des tentatives d'ingérence dans les affaires de la Russie au Sud-Caucase.
Cette fois, par contre, c'est très précisément à l'Arménie que Sergeï Lavrov fait allusion : « Nous assistons à des tentatives non déguisées de la part des pays occidentaux de quereller la Russie et l'Arménie (appelons un chat un chat), de saper l'architecture de sécurité régionale, en pensant et en se souciant à la fois non pas des intérêts des pays situés ici, mais de leur propres intérêts et situation géopolitique ». Pour lui, faisant référence à « tous les accords tripartites conclus entre les présidents de la Russie et de l'Azerbaïdjan et le Premier ministre arménien, seule leur pleine mise en œuvre et celle des aspects des ententes concernant le corridor Lachin peut « régler » la situation actuelle. C'est exactement ce que nos Casques bleus font maintenant […] J'espère que toutes les parties comprendront que cette disposition, comme toutes les autres de la déclaration tripartite, doit être mise en œuvre par tous et ensemble. Chaque partie a ses propres obligations ».
À la question d'un journaliste qui estimait que le public arménien attendait des déclarations ciblées de son allié russe, dans le contexte actuel et extrêmement tendu de ses relations avec et entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, Sergeï Lavrov n'a pas mâché ses mots en désignant à propos à peine voilés, qui, à ses yeux, en portait la responsabilité. « Nous devons toujours chercher des moyens de concilier les parties et d'équilibrer les intérêts. C'est exactement ce que la Russie a fait en tant qu'alliée de l'Arménie et en tant que partenaire stratégique de l'Azerbaïdjan, lorsqu'elle a mis fin aux hostilités en 2020. […] tout le monde sait qu'il y avait une possibilité de parvenir à un cessez-le-feu plus tôt mais qui n'a finalement pas eu lieu. Laissez [les historiens] étudier comment tout cela s'est passé ».
De même, sur la prise de distance de l'OTSC vis-à-vis de l'Arménie telle que Nikol Pashinyan l'évoquait lors de sa conférence de presse la semaine dernière, le chef de la diplomatie russe a fait valoir qu'effectivement, « l'Arménie n'a pas refusé de signer la décision de déployer la mission de l'OTSC. Elle a fait l'objet de nombreuses heures de négociations à la veille du sommet de l'OTSC à Erevan présidé par Ararat Mirzoyan le 23 novembre 2022. Tous les ministres l'ont acceptée. Il ne reste plus qu'une petite chose : que les chefs d'État et de gouvernement apposent également leur signature. Cette possibilité demeure, l'OTSC est prête pour cela ».