Une délégation parlementaire française était à Erevan en fin de semaine dernière. Elle était menée par Yaël Braun-Pivet, présidente de l'Assemblée nationale française et quatrième personnage de l'État.
Par Olivier Merlet
Cette visite de deux jours menée tambour battant, mais dont les médias, à l'exception de deux représentants français, ont été tenus à l'écart, avait essentiellement pour objet de montrer que la France se tenait toujours bel et bien aux côtés de l'Arménie. Message a l'intention de la communauté arménienne de France, peut être, doublé de la mise en place d'un accord interparlementaire de coopération signé par les présidents des assemblées nationales arménienne et française.
De caractère institutionnel, il devrait permettre d'approfondir les relations interétatiques arméno-françaises, soulignant la contribution significative des groupes d'amitié formés dans les parlements d'Arménie et de France. "Il s'agit d'accords diplomatiques, de formation ou de lutte anti-corruption", a indiqué Anne-Laurence Pétel, député d'Aix en Provence, présidente de ce groupe à l'Assemblée nationale française. C'est elle également qui a porté devant l'hémicycle la résolution adoptée à l'unanimité le 1er décembre condamnant l'agression de l'Azerbaïdjan contre l'Arménie.
« C'est un devoir d'être là parce qu'il y a des tensions qui se ravivent et qui fragilisent l'Arménie. Nous, la France, nous devons nous tenir à côté des peuples et des pays frères qui subissent des agressions et des violations de leur intégrité territoriale ». Yaël Braun-Pivet, présidente de l'Assemblée nationale française qui menait la délégation parlementaire française est intervenue en salle de presse du parlement arménien aux cotes d'Alen Simonyan, son homologue.
« Ce qui est important pour l'action menée par la France et par le président Emmanuel Macron, c'est d'appeler à la reprise du dialogue entre chacune des parties pour aboutir à un règlement pacifique et pérenne. » C'est en substance ce qui est ressorti des propos de la présidente de l'Assemblée nationale française des quarante minutes de l'entretien accordé aux médias arméniens, seul évènement de cette visite de deux jours auquel ils étaient conviés. La période est plus tendue que jamais en Arménie où les échos d'une nouvelle guerre ne font que s'amplifier. Sans doute tenait-on à ménager l'image bienveillante et le capital sympathie dont jouit la France auprès de l'opinion publique arménienne qui la considère majoritairement comme son premier allié mais qui commence à se sentir bien seule face aux menaces imminentes dont elle fait l'objet de la part de l'Azerbaïdjan.
Interrogée à ce propos sur un engagement plus fort de la France aux côtés de l'Arménie et sur un autre terrain que celui des mots, l'adoption de sanctions contre l'Azerbaïdjan ou la fourniture d'un appui militaire, Yaël Braun-Pivet estime que « l'heure n'est pas venue d'utiliser d'autres voies tant que celles du dialogue et d'une paix possible ne sont pas complètement explorées et tant que nous n'aurons pas tout tenté. Je crois que c'est la bonne voie » a-t-elle ajouté, « si nous la considérions vaine, nous ne l'emploierions pas. C'est celle en tous cas que nous avons choisi d'emprunter, celle d'une médiation la plus active possible et celle d'un soutien le plus indéfectible possible à la République d'Arménie, de nouveau manifesté aujourd'hui par ma présence ici ».
Alen Simonyan, le président de l'Assemblée nationale arménienne n'a pas manqué de lui apporter le sien, de soutien, en affirmant « nous avons besoin de la France comme médiateur, pas comme partie prenante ».
Yaël Braun-Pivet a bien sur tenu à exprimer toute l'inquiétude de la France quant à la situation au Haut-Karabakh et au blocus qui persiste depuis plus d'un mois du corridor de Latchin, « entraînant une situation humanitaire qui ne fait que se dégrader ». Mais quant à savoir, comme le lui demandait le journaliste du Courrier d'Erevan, quel statut pouvait être envisageable pour donner une chance à la paix dans la région du Sud-Caucase, la non-réponse s'est faite aussi claire que la position française: « Ce n'est pas à la France de déterminer quel doit être le statut du Haut-Karabagh dans la région. Nous avons une position qui est très claire, nous n'avons pas reconnu son indépendance et son statut n'as pas à être défini par la France mais par le droit international, par les différents peuples et surtout par le règlement entre les différentes parties prenantes.»
« Et lorsque 120000 personnes sont bloquées au Karabagh, que dit le droit international ? » a poursuivi le journaliste. « Le droit international dit qu'il y a un corridor qui doit être ouvert et que la circulation des personnes et des biens doit être assurée. C'est ce que la France demande depuis le début du blocage, que ce corridor soit réouvert en fonction et en respect du droit international » .
La première de tous les députés français a conclu l'entretien en se déclarant « femme de dialogue, convaincue que la négociation politique est encore possible, il ne faut jamais renoncer au dialogue et à la recherche d'une solution pacifique ».
Yaël Braun-Pivet a ensuite pu rencontrer le Premier ministre Nikol Pashinyan et le ministre des Affaires étrangères Ararat Mirzoyan. La délégation parlementaire s'est également rendue à la Maison du Soldat ou elle a pu rencontrer de jeunes invalides de guerre et à l'Université française d'Arménie pour un échange de deux heures avec les étudiants.