Dans une interview accordée à nos confrères d'Armenpress, le ministre des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, a réaffirmé hier la volonté arménienne de poursuivre le processus de paix avec l'Azerbaïdjan. Exprimant aussi ses inquiétudes envers les intentions réelles de la partie adverse, il a invité à deux reprises les « collègues internationaux » de l'Arménie à la soutenir dans ses efforts.
Par Olivier Merlet
Trois jours après l'annonce d'Ilham Aliyev de sa non-participation à la réunion des pourparlers de paix avec l'Arménie qui devait se tenir le 7 décembre à Bruxelles sous les auspices de l'Union européenne et de la France, Ararat Mirzoyan, a indiqué le 28 novembre à Armenpress avoir reçu « seulement hier » les réponses de Bakou aux propositions arméniennes «sur la normalisation des relations ou le projet de traité de paix ». Le ministre des Affaires étrangères n'a toutefois pas précisé la nature de ces propositions et encore moins celle des réponses qui leur ont été données. « Les discussions sont donc en cours », a-t-il simplement ajouté, « nous espérons parvenir à un accord sur cette question dès que possible et les efforts de médiation de nos collègues internationaux peuvent également jouer un rôle important dans ce processus ».
Ararat Mirzoyan a rappelé à ce propos la pleine adhésion de l'Arménie à aux accords de Prague, et répondant au président azerbaïdjanais qui aimerait faire porter à cette dernière la responsabilité de l'annulation du rendez-vous de Bruxelles, il réaffirme la volonté d'Erevan « d'organiser une rencontre entre le Premier ministre arménien, le président azerbaïdjanais, le président français et le président du Conseil européen dans les délais acceptables. La réunion tenue dans ce format [NDLR : quadripartite] a été tout à fait efficace et pertinente dans le contexte du processus de normalisation des relations entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ».
Cette "normalisation" des relations est pourtant bien mise à mal tant sur le terrain politique que militaire. Des échanges de coups de feu se produisent tous les jours sur les territoires occupés d'Arménie et au Karabakh. Hier encore, deux soldats arméniens ont été blesses par des tirs de grenades. Les deux parties s'accusent mutuellement de provoquer et de faire monter les tensions, mais même si personne n'est dupe, ni la communauté internationale semble-t-il, le chef de la diplomatie arménienne s'est pourtant senti devoir répondre mot pour mot aux accusations portées par la propagande azérie.
Sur la question de la démarcation des frontières tout d'abord, et l'intention de Bakou de les faire valoir « sur la base de cartes "historiques" », Ararat Mirzoyan a évoqué de nouveau les engagements pris à Prague convenant, d'un commun accord, de leur définition selon la Charte des Nations-Unie et de la convention d'Alma Ata de 1991, d'après « des actes juridiques qui existaient au moment de l'effondrement de l'URSS et qui avaient une force et une signification légales ».
Sur la question des cartes de champs de mines du Karabakh, ensuite, le ministre a rappelé l'offre faite « de coopérer avec des collègues internationaux afin de promouvoir le décodage des cartes transférées ». Il a en revanche catégoriquement réfuté le fait que l'Arménie continuerait à en disperser, en dehors de son propre territoire, : « Nous ne nions pas que les forces armées de la République d'Arménie effectuent des opérations de minage sur le territoire souverain de l'Arménie et ce, en raison du risque toujours élevé de nouvelles agressions militaires de l'Azerbaïdjan. Les mines présentées n'ont pas été découvertes dans le Haut-Karabakh, mais en 2021 et 2022, dans les territoires souverains occupés de la République d'Arménie ».
L'agression de septembre, l'absence de déclaration de l'Azerbaïdjan quant à la reconnaissance de l'intégrité territoriale réciproque maintes fois exprimées par l'Arménie, « ses propos maximalistes et bellicistes, ainsi que les accusations infondées et les menaces de recours à la force contre la partie arménienne ne cessent pas » s'insurge Ararat Mirzoyan. « En outre » poursuit-il, « les forces armées azerbaïdjanaises continuent de se trouver sur le territoire souverain de la République d'Arménie, et l'Azerbaïdjan mène régulièrement des actions militaires provocatrices »
« La combinaison de ces faits montre que la situation reste extrêmement tendue » reconnait le ministre des Affaires étrangères en conclusion de son entretien à l'agence de presse arménienne « Tous nos collègues internationaux doivent faire des efforts supplémentaires pour freiner les ambitions de l'Azerbaïdjan et préserver la paix fragile dans le Caucase du Sud. La partie arménienne, comme auparavant, est prête à faire tout son possible pour trouver des solutions mutuellement acceptables et établir une paix durable et stable dans la région ».