Discussions tripartites de Moscou : on se revoit la semaine prochaine

Actualité
26.05.2023

Les rencontres successives de Moscou entre Vladimir Poutine, Ilham Aliyev et Nikol Pashinyan dans la journée d'hier n'ont abouti qu'à la promesse de se revoir… À Moscou dans une semaine.

Par Olivier Merlet

 

« V. Poutine : Nous sommes jeudi aujourd'hui. Avez-vous des souhaits du côté arménien ou de la délégation azerbaïdjanaise ? Parce que nos collègues devront se mettre d'accord. Est-ce que ça va dans une semaine ? Oui ?

N. Pashinyan : Oui.

V. Poutine : Ilham Heydarovitch ?

I: Aliyev : Oui.

V. Poutine : Merci beaucoup à la presse, nous allons travailler un peu à huis clos ».

Minutes précises de la déclaration agréée par les trois chefs d'État, le communiqué du Kremlin tombé en fin de soirée le 25 mai tenait presque de la pièce de théâtre. Dans le rôle-titre, Vladimir Poutine bien sûr, et dans son épilogue, tout y était, c'est à dire rien, aucune information sinon celle de se revoir, dans une semaine, comme de bons amis. « Et allons maintenant discuter seuls à seuls »...

Un peu plus tôt dans l'après-midi, lors du Conseil des dirigeants de l'Union économique eurasiatique qui les avait réunis à Moscou, Ilham Aliyev et Nikol Pashinyan s'étaient livrés devant micros et caméras à une nouvelle passe d'armes sémantique sur la notion de corridor.

« Je tiens à souligner qu'un seul couloir est mentionné dans la déclaration [du 9 novembre 2020, NDLR], c'est le couloir de Latchine, censé être sous contrôle des casques bleus russes, mais, malheureusement, il est illégalement bloqué par l'Azerbaïdjan. L'Arménie est prête à débloquer toutes les liaisons de transport et économiques qui traversent son territoire de l'Arménie, nous l'appelons le carrefour arménien, et nous sommes prêts à ouvrir les communications régionales conformément à la souveraineté et aux lois des pays », avait tout d'abord énoncé le Premier ministre.

Le président azerbaidjanais se défendant ironiquement de vouloir lancer la polémique lui a répondu en ces termes : « puisqu'on nous a accusé ici d'avoir des revendications territoriales de la part de l'Arménie, je dois dire que nous n'avons pas de telles aspirations. Il faut faire beaucoup d'efforts et avoir une imagination très vive pour voir des revendications territoriales dans mes propos. Quant au mot "corridor" que j'ai utilisé, j'utilise le même mot pour parler du couloir "Nord-Sud". Le mot "corridor" n'est pas un empiètement sur le territoire de qui que ce soit ». Quant au "corridor" de Latchine cette fois, Ilham Aliyev a catégoriquement rejeté tout blocage ou même "intention de", évoquant simplement l'installation d'un point de contrôle.

« Passage, route - tout cela est important, et il y a ici des contradictions. Cependant, ce qui est beaucoup plus important, c'est ce dont le président azerbaïdjanais et le Premier ministre arménien ont parlé il y a quelques instants, à savoir qu'il existe un accord sur une question fondamentale, la question de l'intégrité territoriale », concluait le maître du Kremlin, sifflant la fin de l'échange. Sur cette question de "couloir", celui de Latchine, perdu semble-t-il, et la route du Zangezur, à défendre cette fois, c'est le désaccord qui est fondamental, sans doute celui qui retient encore les signatures. « Les questions liées au déblocage des transports régionaux et des infrastructures économiques ont été discutées », c'est la seule information qui ressort des comptes-rendus, avec celle de la promesse de se revoir, la semaine prochaine.

Rendez-vous avait été pris par le Premier ministre arménien de répondre à l'invitation d'Emmanuel Macron, Olaf Sholltz et Charles Michel de se retrouver avec Ilham Aliyev - ce dernier n'ayant toujours pas répondu officiellement - au sommet  de la Communauté politique européenne, à Chisinau en Moldavie le 1er juin, c’est-à-dire dans six jours. La date précise de nouveau rendez-vous de Moscou "suggéré" par Vladimir Poutine n'a pas encore été arrêtée. « Dans une semaine », à la date d'hier soir jeudi, c'est aussi le 1er juin. La course au traité de paix continue et avec elle l'instrumentalisation écœurante de l'Arménie dans son conflit avec l'Azerbaïdjan, que ce soit par ses alliés militaires d'hier et peut-être encore d'aujourd'hui, ou par ceux qui promettent de le devenir.

Et puisque c'est de compétition dont il s'agit, entre-t-on réellement dans la dernière longueur ? Bruxelles et Washington ont même d'ores et déjà programmé un deuxième essai, au cas où, à Grenade le 6 octobre. Prometteur n'est pas payeur, c'est l'Arménie qui trinque. Vae victis !