La mairie d'Erevan limoge peu à peu son opposition

Société
11.09.2024

Le Conseil des Anciens de la capitale a approuvé, le 10 septembre, la destitution de trois conseillers représentants de son opposition.

Par Olivier Merlet

 

Après l'éviction en février dernier d'Hayik Marutyan, ancien maire d'Erevan, de trois de ses co-listiers du "Progrès National" et d'une élue de "Mère Arménie", le Conseil des Anciens a voté le 10 septembre, par 33 voix sur 65, la destitution de Grigori Yeritsyan, chef de file du "Progrès national" à la mairie d'Erevan ainsi que d'Anuysh Khudaverdyan et Anush Ginosyan, conseillères étiquetées "Voix publique". Le motif invoqué de cette nouvelle décision est le même que précédemment : l'absentéisme des intéressés aux séances.

Si la loi arménienne prévoit effectivement la possible révocation d'un élu en cas de non-participation répétée aux votes en séance, de nombreux conseillers de l'opposition ont commencé à boycotter les sessions législatives en signe de protestation contre le déroulement des élections municipales en septembre l'an dernier. Aux termes de tractations électorales contestables, Tigran Avinyan, proche allié politique du Premier ministre Nikol Pashinyan représentant du Contrat Civil, parti de Nikol Pashinyan avait été élu avec une majorité relative de 32 voix sur les 65 sièges que compte l'assemblée.

Suren Grigoryan, adjoint au maire d'Erevan a commenté la décision du Conseil des Anciens :  « Si nous parlons de boycott, le boycott est une exception. En d’autres termes, vous accomplissez votre travail normal, vous boycottez certaines questions. Nous n'avons même pas ici affaire à un boycott de Grigor Yeritsyan, car d'autres membres de la même faction sont venus ».

Les trois conseillers évincés hier ont qualifié leur limogeage de politique et ont accusé le Tigran Avinyan d'avoir orchestré le vote en coulisses.  « Cher Monsieur Avinyan, c’était une très bonne affaire politique. J’en appelle aux habitants d’Erevan : la prochaine fois, réfléchissez bien avant de voter », a déclaré Anush Ginosyan. Grigori Yeritsyan, lui, conteste les faits qui lui sont reprochés en affirmant qu'il était bien présent à 5 des 7 séances échues. « J'ai toujours assisté aux réunions du Conseil des anciens, cette décision est nulle et non avenue, elle n'a aucune force juridique et nous ferons appel devant le tribunal ».

De fait, le Contrat Civil, majoritaire de justesse à la mairie d'Erevan semble chercher à consolider ses positions à la tête de la capitale comme il semble avoir voulu le faire dans le reste du pays. Au mois de mai 2022, le Premier ministre nommait Arkadi Peleshyan maire par intérim de Vanadzor, la troisième plus grande ville d'Arménie, en remplacement de Mamikon Aslanyan, arrêté pour abus de pouvoir et fraude moins de deux semaines après avoir mené son parti à la victoire contre le Contrat civil lors des élections locales de décembre 2021. En décembre dernier à Alaverdi, suite à la défection d'un de ses membres au profit du Contrat Civil, le nouveau conseil municipal ainsi constitué votait la defiance contre Arkadi Tamazyan, maire "Terre de vie" ("Aperlu Yerkir").

Dans son rapport publié en avril cette année , l'ONG américaine Freedom House dégradait la note attribuée à l'Arménie pour l'aspect démocratique de sa gouvernance nationale, «« en raison de la tendance à la concentration des pouvoirs de l'exécutif, de la tendance régulière, l'année écoulée, des autorités centrales à dépasser les limites et à destituer les maires de l'opposition, et du manque de transparence dans les finances du parti au pouvoir ».