Pas de pétrole, mais des octets : l’UFAR place l’IA et la cybersécurité au centre des débats

UFAR-ի հատուկ հավելված
02.12.2025

À l’UFAR, l'avenir s'écrit en octets. L'université organisait ce 26 novembre, une conférence consacrée à l’intelligence artificielle (IA) et à la cybersécurité. Animée par la rectrice Salwa Nacouzi, la rencontre a réuni plusieurs experts venus analyser les risques et les opportunités liés à l’émergence de systèmes autonomes.

 

Par Zacharie Mauboussin

Remise des diplômes et ouverture des débats

La séance s’est ouverte par la remise de diplômes aux étudiants ayant validé leur formation en cybersécurité, en présence de Ralph Yirikian, directeur général de l’opérateur Ucom. 

La table ronde s'est ensuite articulée autour du sujet suivant : « La course à l'armement dans le domaine de l'IA : utiliser la science des données pour dépasser les menaces autonomes ».

 

 

L'IA, une arme aux multiples facettes

Interrogé par Salwa Nacouzi sur le rôle de l’IA dans la défense contre les attaques utilisant le même outil, Karen Eguiazarian a souligné que cette technologie permet désormais d'analyser des idonnées, parfois sensibles, en grande quantité. Les progrès techniques rendent difficile la distinction entre images générées et photographies, créant un terrain propice à de nouvelles formes d’influence et de manipulation.

Jérôme Mengin, enseignant à l’Université de Toulouse, alerte de son côté sur l’opacité des systèmes d’apprentissage automatique. À mesure que l’IA gagne en autonomie, son fonctionnement devient de plus en plus complexe à comprendre. Demain, certaines armes autonomes pourraient choisir leurs cibles sans supervision humaine.

« La logique [des armes autonomes] dépasse l'entendement humain » souligne-t-il.

Pour Ralph Yirikian, l’avènement de l’IA ne doit pas faire oublier les bases de la cybersécurité. Les attaques les plus rudimentaires - déni de service, piratage de comptes - restent aujourd’hui efficaces. Il rappelle quelques principes simples : avoir des mots de passe robustes, uniques, et se méfier des liens reçus par mail.

Les intervenants ont également abordé la question de la surveillance de masse. Ralph Yirikian et Jérôme Mengin ont recommandé de limiter au maximum les données transmises aux outils d’IA, comme ChatGPT, afin de réduire les risques de divulgation de données personnelles.

 

Un enjeu géopolitique : le cas de l'approvisionnement énergétique

Selon George da Costa, spécialiste des questions énergétiques, la course à l'IA accroît la pression sur les infrastructures. Si la flambée des prix des composants informatiques en est la première conséquence visible, ceci préfigure des tensions sur les chaînes d’approvisionnement. L’extraction des ressources, l’alimentation des serveurs, le refroidissement des centres de données : tous ces processus ont un coût environnemental. Aujourd'hui, les centres de données consomment entre 3 et 4% de l'énergie mondiale.

À l'avenir, il faudra choisir entre alimenter ces centres ou avoir de l'électricité pour la vie quotidienne. La régulation du numérique, centrée sur les données personnelles. devra intégrer la notion de soutenabilité énergétique.

Ralph Yirikian a rappelé la nécessité de s'adapter aux changements technologiques, citant l'exemple de Nokia : géant mondial de la téléphonie, l'entreprise est aujourd'hui un acteur secondaire, faute d'innovation.

Interrogé par Salwa Nacouzi, Karen Eghiazarian a identifié comme première menace la manipulation des réseaux (astroturfing). Ce risque est pris au sérieux par les entreprises du numérique qui développent des algorithmes afin de prévenir ces manipulations. Au-delà d'une simple question technique, il s'agit de préserver - dans la mesure du possible - l’opinion publique des attaques informationnelles.

 

Pour conclure, les intervenants soulignent l’importance de la recherche et de la formation dans ce domaine. Jérôme Mengin a encouragé les étudiants à prolonger leurs études au maximum afin de développer leurs connaissances.

Ralph Yirikian abonde dans ce sens : « L’IA est la voie d’évolution de l’humanité », tout en rappelant qu’une technologie puissante peut toujours être détournée.

Karen Eguiazarian partage ce constat : l'IA est l'arme de demain et les superpuissances se battent pour la contrôler. En 2017, Vladimir Poutine soulignait déjà : « Le leader en intelligence artificielle dominera le monde ». Plus récemment, les États-Unis ont annoncé un plan d'investissement dans l'IA, « comparable au projet Manhattan ». Le ton est donné.

Pour Jérôme Mengin, l'enjeu est clair : « les sociétés seront divisées entre ceux qui auront accès à l'IA et les autres ».

La rencontre s’est achevée sur un rappel de Salwa Nacouzi : le développement de l’IA doit s’accompagner d’un renforcement de nos capacités d’analyse et de notre esprit critique.

 

Où se situent les étudiants ?

À la suite de la table ronde, les étudiants ont présenté leurs productions. Parmi elles, des affiches à la croisée de l’analyse technique et (géo)politique. Un travail de pédagogie, nécessaire pour appréhender les enjeux du numérique .