Le vendredi 14 novembre, la France célébrait le trentième anniversaire de son ambassade en Arménie, en réunissant de nombreux amis de la France dans le pays. Cette rencontre a été l'occasion de dresser un bilan des relations entre les deux nations au cours des trois dernières décennies, et de mettre en lumière les liens historiques et culturels qui les unissent toujours.
Par Camille Ramecourt
Le 7 novembre 1995, la France a hissé pour la première fois son drapeau en République d'Arménie, marquant l'établissement d'une ambassade à Erevan et s'inscrivant parmi les premiers États à établir des relations diplomatiques avec l'Arménie indépendante. Le secrétaire général du Ministère des Affaires Étrangères, Davit Karapetyan, présent à la cérémonie de la célébration de cette date, prononça l'un des deux discours de la cérémonie, rappelant que les relations franco-arméniennes s'inscrivent dans les siècles et exposant l'étendue des domaines de collaboration entre la France et l'Arménie.
La coopération entre les deux pays revêt un caractère politique, comme en attestent les nombreuses visites réciproques entre les membres de leurs exécutifs et de leurs parlements. Cette dynamique s'inscrit dans une perspective économique, comme l'illustrent la présence d'entreprises françaises, telles que Veolia, Pernod Ricard ou Carrefour, sur le sol arménien. En outre, elle joue un rôle culturel et éducatif, notamment en collaboration avec des institutions telles que le Lycée français Anatole France, l'Université française en Arménie (UFAR), et l'Institut français. Cette dynamique s'illustre également dans le cadre de l'exposition « Dialogues sacrés entre le Louvre et le Musée d'Histoire d'Arménie », qui témoigne d'un échange culturel et artistique entre deux institutions françaises et arméniennes de renom. Dans son analyse, Davit Karapetyan a mis en exergue les collaborations militaires et décentralisées, illustrant son propos par l'exemple de l'Agence consulaire de Goris, inaugurée en juin dernier. C'est dans cette ville que se sont tenues les cinquièmes Assises de la coopération décentralisée Arménie-France, événement auquel ont pris part environ 250 délégués représentant les autorités régionales et municipales françaises.
Dans le cadre des échanges diplomatiques, le représentant du Ministère des Affaires Étrangères de la République d'Arménie a mis en exergue l'importance du rôle de la France en tant que pays partageant des valeurs communes, notamment dans le contexte géopolitique actuel. Il a exprimé sa gratitude pour le soutien et la solidarité inconditionnels apportés par la France à l'Arménie et à son peuple, tant sur le plan étatique que politique et public. Ce soutien a été réaffirmé par Son Excellence l'ambassadeur Olivier Decottignies :
Notre soutien à l’Arménie, le Président de la République l’a dit, « est inconditionnel, il est entier, et il est constant »
Cette inconditionnalité est considérée comme le principe directeur de l'ambassade, comme l'a affirmé l'ambassadeur. Cette démarche illustre l'essence même de la mission de l'ambassade, à laquelle elle se consacre avec assiduité. Par ailleurs, si la situation de l'Arménie a connu d'importantes transformations au cours des 30 dernières années, la France a su maintenir une position constante, accompagnant l'Arménie aussi bien dans les périodes fastes que dans les moments difficiles. Ainsi, les années 1980-1990 ont été, pour les Arméniens, une période de grande précarité, marquée par des catastrophes naturelles et des problèmes économiques.
En effet, le pays a été confronté à un séisme dévastateur en 1988, à une reconstruction économique difficile, à un conflit armé et à une pénurie généralisée de biens de consommation. Dans la ville d'Erevan, l'exploitation forestière était une pratique courante pour répondre aux besoins de chauffage de la population. Néanmoins, il est important de souligner que la situation présente a subi des transformations majeures.
Olivier Decottignies a exprimé sa joie en observant Erevan comme une métropole florissante, innovante et énergique, orientée vers l'Europe, et une Arménie qui a diversifié ses options stratégiques, qui a « fait preuve du courage de faire la paix, qui n'est pas moins grand que celui de faire la guerre », et qui manifeste une « vocation à redevenir un carrefour dans la région ».
Dans le contexte de cette nouvelle Arménie, l'ambassade de France a procédé à un rituel protocolaire, incluant le levée de ses couleurs et la diffusion des deux hymnes nationaux, en prélude à l'inauguration solennelle d'une plaque commémorative dédiée à Alain Daronian. L'architecte d'origine franco-arménienne, c'était lui qui avait été mandaté pour transformer cet espace en une ambassade, reflet de l'engagement de la capitale dans la promotion de l'art et de la culture. Vahagn Khatchatourian, alors maire d'Erevan et aujourd'hui président de la République, avait fait don de la Maison des Artistes du Théâtre Sundukyan à la France. L'ambassadeur a exprimé sa satisfaction quant à l'initiative, la qualifiant de « magnifique cadeau » et de « beau clin d'œil », et a souligné que la diplomatie peut être considérée comme une forme de théâtre. En 2024, le décès d'Alain Daronian marque la fin d'une période d'échanges culturels et artistiques entre la France et l'Arménie. C'est dans ce contexte que l'architecte Jean-Michel Wilmotte a été convié à découvrir le pays, et que la plaque apposée sur la façade du bâtiment a été dessinée par ses soins. Il convient de préciser que ce dernier est également l'architecte chargé par la ville d'Erevan d'achever le complexe emblématique de Cascade, perpétuant ainsi la collaboration culturelle franco-arménienne.
Dans son allocution, Olivier Decottignies a exprimé sa gratitude envers les corps diplomatiques ainsi que les agents de droit locaux, qu'il a qualifiés de « force et de mémoire » de la France en Arménie. Il a également rendu hommage à Khatchik Sariboghossian et Hacop Ghazarian, dont le décès a profondément ému l'ambassade. L'ambassadeur de France en Arménie a conclu son allocution en ces termes : « C'est ici votre maison. Nous vous souhaitons la bienvenue.»
